26 janv. 2018

Rage




Charles Decker est, en apparence, un petit lycéen américain bien tranquille. Mais, entre un père violent qu'il déteste et une mère fragile, il rage a froid. Un jour, cette rage éclate et il abat, d'un coup de revolver, sa prof de maths. Puis, il s'empare du pouvoir, autrement dit, il prend sa classe en otage. Il va alors contraindre ces condisciples a se livrer a un déballage furieux, a se débarrasser de toutes les haines accumules en secret : contre les parents, la société corrompue, l'école pourrie, la lâcheté et l'incompréhension des adultes.



Pourquoi ce livre ? Tout simplement parce qu’un homme me l’a collé de force dans les mains. Pas possible d’y échapper, je me suis donc pliée à ces exigences et me suis attaquée à ce court roman.

Je craignais sincèrement la lecture de cette œuvre. J’avais connaissance du sujet évoqué – même si je ne me suis pas intéressée de près à ce « fait divers » - je connais le style de l’auteur, j’appréhendais la manière dont il détournerait l’affaire. Et si je ne maîtrise pas totalement celle-ci, cela n’a pas empêché cette lecture d’être marquante.

Rage est le récit d’un adolescent qui ne trouve qu’incompréhension dans son entourage. Personne ne le comprend, lui-même est en lutte perpétuelle, avec cette boule de folie dans le ventre qui tend à le rendre impulsivement dangereux. Pas besoin d’avoir un diplôme de psychanalyse pour percevoir, dès le premier chapitre, qu’il y a un boulon fêlé dans la caboche de ce garçon.
En réalité, il est à la fois cinglé et sain d’esprit. Le premier parce qu’il tue à de multiples reprises et provoque des dégâts colossaux à des bâtiments publics ; il réagit comme un loup Oméga blessé qui a décidé de changer son sort – ou du moins de s’exprimer. Et à côté de cela, il échange avec ses camarades – pas toujours sur un ton sain – et crée un espace de débat où chacun a la possibilité de s’exprimer sur un thème d’actualité pour cet âge-là, comme la famille ou le sexe, les premières expériences. Expliqué ainsi, cela n’apporte rien de transcendant. Essayez simplement de vous mettre dans la peau d’un de ses ados : pris en otages, d’abord apeurés, ils vont libérer leur expression et on va obtenir l’effet contraire souhaité à une prise d’otage.
N’oublions pas que c’est un King. Il faut du malsain, si ce n’est pas de l’horreur… La fin nous frappe de plein fouet. Le personnage de Ted, à une époque le symbole de la jeunesse prospère et flamboyante, tombe en disgrâce par la différence de comportement vis-à-vis des autres. Figure marginalisée, ses remarques attirent le courroux des autres et… Stephen King rappelle à quel point son imagination est malsaine – à moins que cela ne soit la vérité ?
Bref, la fin est terrible, elle frappe littéralement, je vous assure que je me suis sentie mal – et cela assure ma réceptivité !

L’intrigue évolue en quasi huis-clos, difficile donc d’avoir un foisonnement des personnages.
Le plus fou est bien entendu le protagoniste, Charly. Il nous plonge d’emblée dans son élan de folie malsaine, il tue sans sommation et pourtant, il reste de l’humanité en lui ; autrement il n’aurait pas agi de la sorte envers ses camarades sur la fin. Or personne ne cherche à l’aider, et il sombre lentement mais sûrement. Rien de surprenant en soi. Et dans une telle prise de conscience, reste-t-il le monstre ou n’est-ce pas le reste de l’humanité ? (Vous avez quatre heures.)
Ted m’a le plus marqué. Eloigné de cette folie, il incarne la dernière part d’humanité dans ce huis-clos de la classe. Celle-ci se fait bafouer et piétiner proprement, comme si l’espoir n’était plus permis, qu’il ne restait et resterait que la bête en nous.
Du reste, les adultes sont totalement soumis à la loi de la jungle que régit le héros, comme si les « anciens » étaient dépassés au point d’être d’en être inutiles et ni leurs connaissances ni leurs expériences, à l’inverse de ce qu’ils répètent inlassablement, ne les préparent à cette impasse. Quant aux autres enfants, dans un sens ils participent à cette mascarade, générant parfaitement cette société conformiste à petite échelle. Et le seul « aliéné » de celle-ci ne s’en sort pas, cela montre bien dans quelle « merde » on se situe.

Point positif lié aux personnages, c’est que l’intrigue est posée par un point de vue interne. De ce fait on assiste aux pensées de Charly, à ses interrogations, son cheminement de pensée et c’est vraiment un plus à l’intrigue puisque le lecteur est invité dans ce nouveau huis-clos que représente les pensées du personnage. Cela apporte un intérêt certain à l’ouvrage.

La plume respecte l’image que j’ai de King. Il ne s’embarrasse pas de détails, il va au plus court pour amplifier l’horreur du propos, et cela fonctionne parfaitement. C’est percutant à souhait.



Un livre saisissant, efficace. Le thème est choquant, et le format court du livre rend le propos plus percutant encore. Le rôle de chacun des personnages est génial, chacun amplifie l’horreur de l’intrigue tout en évoquant des thématiques d’actualité. Bref, ce n’est pas le meilleur King que j’ai lu mais j’ai su apprécier celui-ci.



14/20


2 commentaires:

  1. J'ai beaucoup aimé ce roman que je viens de terminer. Je trouve que King est un incoryable conteur d'histoire car il s'en tire toujours avec des sujet de départ pas facile. Avec Rage, il met la barre très haut je trouve car il va chercher l'essence de la société et il en fait une histoire fondamentale.

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    1. En fait, je trouve qu'il a un style particulièrement glaçant qui rend très bien avec ses écrits, on rentre plus facilement dans l'ambiance austère ou grinçante.

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